Il était une fois un petit chien prénommé Raoul, il habitait une petite ville tranquille où il ne se passait pas grand-chose. La routine commençait à le lasser et bien qu'il ait beaucoup d'amis il revait de connaître autre chose, de sortir de ce train-train trop bien commencé : il avait un travail à l'usine de mécanique de précision, sans que cela ne l'épanouisse pleinement.
Un matin, cela le prit comme une envie subite, il fit un rapide baluchon, ramassa ses économies à la banque et prit un billet de train pour la ville. Il avait envie de savoir comment vivaient les autres, ceux de la ville qu'il enviait tout le temps.
Arrivé à la grande ville ( à quand même 300 kms de chez lui), il prit une chambre d'hôtel et décida de visiter cette cité tant rêvée et idéalisée.
Le soir, pour ne pas être seul et surtout pour s'imprégner de l'ambiance de la ville, il décida de manger au restaurant, pas un grand restaurant, mais un bistrot de quartier. Il prit un os à la moelle agrémenté d'un steack de bison ; il aimait goûter à de nouvelles choses. Le repas terminé, il décida d'aller siroter une mousse dans un bar populaire et ainsi de lier connaissance avec des autres chiens.
Après une soirée pleine de rencontres variées, il finit la soirée chez Alejandro, un batard de 5 ans. Encore quelques verres et malheureusement il tomba comme un vieil os de mamouth, il s'affala sur le sol et s'endormit à moitié comateux.
A son réveil, il se rendit compte que son nouveau copain était également allongé à côté de lui et ronflait comme un vieux chien malade.
Sans faire de bruit, il se remit sur ses pattes, et sortit au grand air, la tête lui faisait légèrement mal et il se sentait à côté de ses coussinets.
Doucement, il retourna à son hôtel et se promit de repasser plus tard pour voir si Alejandro ne l'avait pas oublié.
Un nettoyage de puces plus tard, il se sentait déjà mieux et prêt à affronter les agences d'interim afin de trouver du travail, car ses économies ne lui permettraient pas de tenir longtemps.
La chance lui sourit et dès le lendemain il attaqua dans un grand magasin des quais en tant que gardien de sécurité ; malgré sa petite taille lorsqu'il sortait les crocs, tout le monde se méfiait.
Progressivement il prit l'habitude de retrouver Alejandro et les autres, le soir au bar et de boire plus que de manger ; ils refaisaient le monde autour d'une bonne écuelle de bière fraiche. L'utopie les gagnait, ils avaient envie de refaire ce monde pourri où il fallait travailler pour gagner de l'argent.
- pourquoi travailler, disait Alejandro
- ben, pour pouvoir payer nos mousses, répondait Raoul
- et pourquoi ?on serait si bien couché à regarder la mer
et cela continuait ainsi de suite toutes les soirées et une bonne partie des nuits.
A ce rythme, notre petit Raoul commençait à présenter les premiers signes de fatigue et son caractère d'habitude si agréable, commençait à s'aigrir ; lui aussi commençait à vouloir agir pour faire changer ce monde. Sans s'en rendre compte il devenait de plus en plus extremiste il voulait forcer cette société à bouger, qu'elle le veuille ou non.
Heureusement pour lui, il décida après six mois passés sans donner de nouvelles, à faire le grand saut pour un week-end et à retourner chez lui, dans sa petite ville si tranquille.
Personne ne l'attendait à la gare lorsqu'il débarqua du train, c'était normal puisqu'il n'avait prévenu personne ; toutefois ce vide lui fit beaucoup de mal. Il se sentit seul au monde et ses nouveaux amis lui manquaient déjà, il se demandait comment il ferait pour rediscuter de choses banales et sans intérêt avec ses anciennes connaisances.
Pour sa première nuit de retour chez lui, il préféra dormir sur la paillasse de l'entrée afin de ne pas inquiéter sa famille.
Le week end fut horrible, tout le monde le fuit :
- pourquoi tu n'as pas donné de tes nouvelles ?
- pourquoi tu te laisses pousser les poils du dos ?
- pourquoi, pourquoi ?
que des questions, mais aucune lui demandant comment il allait et pourquoi il était parti. Tout ce qui les intéressait c'était de savoir des détails pratiques sans intérêt, mais lui, Raoul le petit chien de province, à quoi il pensait maintenant ? Tout le monde s'en désintéressait.
Ce constat finit par lui miner le moral, et c'est toutes pattes dehors qu'il reprit dès le samedi soir le train pour la grande ville afin d'y retrouver ses nouveaux amis, qui eux ne l'interrogeaient jamais sur son passé.
Aussitôt débarqué du train, il fila à toutes jambes vers son bar habituel pour y retrouver ses nouveaux amis ; ce n'étaient pas les meilleurs chiens du monde et ils aboyaient plus qu'ils ne mordaient, mais au moins ils l'écoutaient. Il fut accueilli en héros et cela lui fit chaud au cœur.
La vie se poursuivit ainsi, et quelques années après, il rencontra une petite chienne révolutionnaire comme lui et eurent de nombreux petits chiots…..il ne se retourna plus sur son passé et ces gens qui n'avaient jamais su s'ouvrir aux autres en tentant de comprendre ses motivations.
Toute similitude avec des faits réels sont indépendants de la volonté d'Alfred, car cette histoire constitue une pure histoire sans intérêt si cela n'est celui de m'avoir fait plaisir de l'écrire et c'est là le plus important
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